On fête, mais on se porte assez souvent candidat à une intoxication alimentaire. Ces dernières semaines, les descentes des services de contrôle sanitaire ont permis de saisir des tonnes de victuailles de toutes sortes impropres à la consommation ou préparées dans des conditions insalubres.
Un de nos voisins, étranger, nous a dit un jour que «les Tunisiens sont toujours en fête».
Et il avait raison. Toutes les occasions sont bonnes pour fêter quelque chose. Noël et jour de l’an, on les fête non pas pour ce qu’ils représentent mais pour le bonheur de se retrouver entre amis entre membres de la même famille, pour sortir et dîner dehors. Bref, une occasion de passer du bon temps, évoquer quelques souvenirs d’enfance, se rappeler les moments inoubliables de voisinage, etc.
Et l’ambiance était bon enfant. C’était la maman qui préparait les gâteaux, la grand-mère qui retrouvait les fourneaux, les enfants qui mettaient de l’ambiance.
Que reste-t-il de ces vestiges du passé ?
Presque rien.
On fête, mais on se porte assez souvent candidat à une intoxication alimentaire. Ces dernières semaines, les descentes des services de contrôle sanitaire ont permis de saisir des tonnes de victuailles de toutes sortes impropres à la consommation ou préparées dans des conditions insalubres.
Pour vendre ces gâteaux confectionnés dans des garages transformés pour les besoins de la cause en laboratoire à pâtisseries, le Tunisien est de ceux qui s’adaptent et qui savent comment happer ces occasions au vol. C’est comme le marchand de beignet ou de fruits secs qui se transforme en libraire à la rentrée scolaire. Ou le fast-food qui se convertit en marchand de «zlabia» à l’occasion du mois de ramadan.
Nous avons réussi à avoir l’adresse auprès d’un livreur de gâteaux dont le «pâtissier» opère du côté de la proche banlieue. Nous nous sommes rendus sur les lieux, mais nous sommes arrivés trop tard.
Le maître de céans nous a avoué qu’il était le premier surpris par ce qui s’était passé : «J’ai loué ma maison pour un couple qui m’avait dit qu’il venait de se marier. En fin de compte, le supposé mari était un pâtissier employé dans un hôtel et la supposée mariée était son assistante. Ils ont amené un four et du matériel qu’ils ont certainement loués quelque part. Ils préparaient des gâteaux qu’ils vendaient en ligne. Les services sanitaires ont opéré une descente à la suite d’un accident qui a eu lieu. Le livreur a endommagé le rétroviseur d’une voiture en roulant en sens inverse. On a suivi ce fil conducteur et le pot aux roses a été découvert».
Dans cette histoire, le pâtissier est un professionnel. Il aurait pu s’installer à son compte et gagner normalement sa vie. Frauder, risquer sa place, valait-il tout ce risque pour gagner quelques sous supplémentaires?
Mais ce n’est pas toujours le cas. Des garages, des espaces souvent insalubres abritent ces…. laboratoires où les conditions d’hygiène font défaut et exposent les consommateurs à bien des risques.
Cette «campagne» de la fête de fin d’année administrative est un feuilleton à répétition qui prend de plus en plus d’ampleur. Les réseaux sociaux ont encouragé plus d’un à se faire de l’argent facile. Aux dépens de la santé des consommateurs qui ne voient que du feu. Les fêtes, sont devenues tout simplement, une occasion jamais perdue pour se faire de l’argent.
Même ces gâteaux que l’on offre à la vente dans les grandes surfaces, depuis combien de temps les a-t-on confectionnés ? Qui a contrôlé la provenance et les dates de péremption des produits utilisés? Sucré ou salé, le recyclage bat son plein et rien n’est jeté. La chaîne du froid a-t-elle été respectée ? Bien entendu, le vendeur est connu et est légalement responsable, mais avec tout ce qu’on ingurgite il n’y a plus de possibilité de distinguer le bon du moins mauvais, l’origine et les conséquences. Les lendemains de fêtes sont difficiles. C’est la course vers les pharmacies pour acheter de quoi se remettre d’aplomb, sans oublier qu’il y a eu des drames.
L’alerte contre ces produits de consommation, lancée dernièrement par le ministère de la Santé, prend toute sa dimension.
Il n’en demeure pas moins que l’éducation du consommateur reste le point faible et ces arnaques dureront tant que les solutions de facilité prendront le pas sur le respect des procédures légales en vigueur. Les quelques interventions des responsables de ce secteur éducatif sont aussi insuffisantes qu’approximatives.
Le marché a en effet tendance à s’affoler dès que ces campagnes furtives se déclenchent, et s’amplifient grâce à des incitateurs professionnels qui utilisent les réseaux sociaux pour convaincre et pousser à la consommation.
Kamel GHATTAS